Au début du 20ème siècle, cet espace était occupé principalement par la résidence et les prairies appartenant au Docteur Hilléreau. Des bâtiments communaux ayant accueilli l’école publique des filles se situaient de l’autre côté de la Route de Saint-Étienne de Corcoué.
Ce secteur du bourg a connu des événements pendant la Seconde Guerre Mondiale. Du 1er avril au 28 août 1941, une trentaine de prisonniers de guerre d’origine algérienne furent affectés dans la commune pour aider à ramasser les récoltes. Ils étaient logés dans les bâtiments communaux sous la garde de soldats de la Wehrmacht. Un des prisonniers profita d’un relâchement des gardes pour emprunter des habits civils et s’enfuir ; il écrivit un mois plus tard qu’il avait réussi à passer en zone libre.
En 1942, des prisonniers de guerre venus des colonies africaines et des Antilles furent affectés par l’armée allemande à la pose d’un câble téléphonique souterrain entre Rennes et Bordeaux, passant par Saint-Philbert-de-Bouaine. Ils logèrent dans les mêmes locaux communaux. Ces hommes, constamment sous surveillance militaire, étaient ravitaillés avec parcimonie par leurs geôliers. Tout au long du chantier, des philbertines leur apportèrent un complément, témoignage de remerciements à ces soldats venus de loin au secours de la France.
Vers la fin de juin ou au début de juillet, Mlle Jeanne Tailler, Mathilde Vignaud et son employée Thérèse Fièvre, Jeanne Bachelier, Marie-Louise Chagneau et Irène Herbreteau organisèrent la préparation d’un solide déjeuner pour secourir ces soldats de l’armée française. Les travaux étant arrivés au lieu-dit du Point du Jour, elles se trouvaient trop chargées pour transporter toutes les préparations. Alors, elles hélèrent le camion de la cuisine allemande. Hélas, des officiers allemands étaient alors présents sur le chantier. Ils voulurent sanctionner ces personnes charitables en procédant à leur arrestation. Les prisonniers de guerre se refusèrent alors à absorber toute nourriture. La situation se débloqua avec l’obéissance des prisonniers à leurs gardiens et la relâche de ces dames.
Le lendemain, pour éviter toute provocation, elles ne confectionnèrent qu’un léger complément alimentaire. En l’absence de Mlle Tailler convaincue du danger de l’opération, elles partirent à bicyclette. Le chantier était ouvert à la Croix-des-Landes. Les gardiens ne firent pas de difficultés pour que les vivres fussent distribuées. Mais la feldgendarmerie survint peu après. Marie-Louise Chagneau put leur échapper après avoir été dissimulée par des prisonniers. Les autres furent interpellées, et leurs identités contrôlées. Mathilde Vignaud fut convoquée pour le lendemain, à la Roche-sur-Yon. Là, elle y fut jugée par un tribunal militaire allemand et condamnée à 3 mois de prison. Cinq jours plus tard, les trois autres interpellées passaient devant les mêmes juges : une condamnation à 15 jours de prison pour la plus jeune, 3 semaines pour les deux dernières.
Du côté des prisonniers, l’un des sénégalais se révolta contre les brimades infligées ce qui lui valut d’être abattu par un soldat allemand.Aussitôt, le groupe fut définitivement évacué.
Plus d’informations sur www.poilus-de-bouaine.eu/accueil3945.html
Les prairies de la Maison Hilléreau servirent de stationnement aux blindés de l’armée nazie, de juin à septembre 1941, et en avril 1943. Un mât fut planté pour hisser le drapeau avec la croix gammée. Si la troupe logeait dans les locaux voisins, la vingtaine d’officiers « s’invitèrent » dans les demeures bourgeoises du bourg.
En 1953, la commune reçut le comice agricole de la Vendée en cet endroit. Ce rendez-vous rassemblait les propriétaires et les fermiers du département pour présenter les expériences de chacun afin d’améliorer les procédés agricoles. Il comportait notamment l’exposition des bovins et des équidés remarquables issus des élevages. Cette manifestation était aussi ouverte au public dans un esprit festif. Elle amena donc la foule.
Après la guerre, cette prairie devint chaque été le lieu où la kermesse paroissiale était organisée, le dimanche au milieu du mois de juillet. Les bénéfices étaient affectés aux deux écoles catholiques. Les habitants étaient assez généreux, soit pour faire des dons en nature qui servaient de lots aux jeux, soit pour acheter des billets de loterie ou miser dans les jeux. C’était un évènement très festif comme en témoignent les programmes ci-dessous parus dans le bulletin paroissial.
Le témoignage d’un jeune homme de cette époque nous fait partager ses souvenirs des kermesses d’après-guerre dans les prairies proches de la Maison Hilléreau. Le mât de cocagne de trois à quatre mètres de hauteur s’adressait aux hommes suffisamment agiles pour décrocher le lot placé au sommet.
Au jeu de la « borgnette», le concurrent armé d’un manche de pelle devait briser une cruche en terre cuite pour gagner le lot caché à l’intérieur.
La roue de la fortune avait son avatar sous la forme d’un manège horizontal à roue ayant des boîtes sur tout son pourtour. Le gagnant avait la surprise de découvrir son lot en ouvrant la boîte désignée : un lapin ou un poulet ou un canard ou des bouteilles… selon les dons reçus.
Les adultes n’oubliaient pas de se rendre au stand de dégustation des vins fins.
Pour les enfants existaient la pêche à la ligne et le jeu de la vache pour lequel il fallait tirer la queue de la maquette avant d’aller récupérer son lot dans la gueule ouverte.
Juste après la guerre, l’attraction de la kermesse fut une course hippique disputée par des habitants montant des chevaux de trait, gagnée par Joseph Leclair.
Les prairies ont disparu au profit de l’urbanisation, principalement par l’installation puis les nombreuses extensions de l’entreprise TRONICO, le premier employeur de la commune. Elle est née en 1972 avec la médiation du maire Eugène Gaborieau : «Les femmes de Saint-Philbert de Bouaine étaient obligées de quitter chaque matin leur village pour aller travailler dans les communes voisines… » Pour ce faire, il fallut associer une entreprise à la recherche d’un sous- traitant -la SERCEL-, un dirigeant investisseur -Gérard Plet-, et vingt-deux actionnaires locaux pour constituer TRONICO. Pour financer le prêt de la construction du bâtiment, le département et la commune apportèrent leur caution. Le terrain de 5000 m² fut choisi à l’intérieur du bourg pour l’aisance des raccordements aux réseaux.
En février 1973, elle commença en assemblant des composants électroniques discrets par wrapping pour le compte de la SERCEL avec quinze ouvrières. Avant de posséder ses propres locaux, elle occupa une salle polyvalente de l’ancienne mairie dans le Champ de Foire. A la fin août 1973, elle entra dans ses murs. Avec un effectif de 43 personnes à 89 % de femmes, d’une moyenne d’âge de 25 ans, l’avenir était prometteur. Ses productions servaient à la réalisation de télémètres pour les géomètres ou des éléments pour Dassault Systèmes.
Progressivement, après sa mission d’exécution, Tronico développa son offre avec la fabrication de cartes électroniques assemblées grâce à une centrale d’achat de CMS et un bureau d’études. Elle multiplia ainsi ses clients, ce qui nécessita un personnel de plus en plus conséquent, jusqu’à cinq cents salariés. Au fur et à mesure, l’entreprise dut procéder à plusieurs agrandissements des locaux avec la contrainte d’un espace limité à l’intérieur du bourg.
De par son expertise, elle a acquis la compétence pour la recherche et le développement. Désormais, elle conçoit, industrialise et fabrique, des produits complexes à dominance électronique.Ses activités concernent principalement l’avionique et le médical. Depuis 2004, elle compte une autre unité de fabrication au Maroc.
Dans la même période que l’installation de Tronico, un atelier de mécanique agricole et le premier lotissement, dit du Champ Bourgeois, ont été construits.
Du côté pair de la Rue de la Mairie, des bâtiments municipaux anciens demeurent, à savoir au centre le logement de fonction avec un étage, et deux ailes en rez-de-chaussée. A la fin du 19ème siècle, la classe unique de l’école publique des filles occupait l’aile droite avec quatorze élèves. Après la Seconde Guerre Mondiale, c’est le bureau de poste qui s’y installa et la famille du receveur trouvait domicile dans le logement voisin. La Poste était hébergée jusqu’alors dans la demeure bourgeoise des Quatre-Routes. C’est la mairie qui déménagea du Champ de Foire dans l’aile gauche, avec une salle de réunion pour le conseil municipal et un bureau servant principalement à l’unique secrétaire de mairie.
L’identité graphique de la commune permet de mesurer l’adaptation de la commune à son temps.
Ce blason fait référence au Duché de Bretagne (quartier d’hermines) et au Comté du Poitou (trois quartiers de gueule -rouge- aux tours donjonnées de trois tourelles d’or), avec une croix d’argent perronnée de trois degrés. L’écu est surmonté d’une couronne muraille et est accompagné de deux branches dites fruitées, l’une de vigne (symbole de l’allégresse de société), l’autre de chêne (symbole de longévité). Au-dessous, la devise « renaissance et confiance » est attribuée à la commune.
Sur fond ovale gris évoquant la pierre de la carrière un arc en ciel s’inscrit en 4 couleurs représentant :
- L’Industrie (pour le rouge)
- L’Agriculture (pour le vert)
Les deux dimensions marquantes de la commune enserrant deux liserés de couleur jaune et bleu, symbolisant :
- Les cours d’eau de la Boulogne et de l’Issoire (pour le bleu)
- Le blanc du pays et la lumière (pour le jaune).
L’arc-en-ciel s’oriente délibérément vers l’avenir propulsant la lettre B symbole de Bouaine (Saint-Philbert-de-Bouaine) dans un espace d’activités.
Celui-ci est né au début des années 2022 : un graphisme plus moderne qui évoque une identité rurale, le lien avec l’eau et la terre et l’attachement à un cadre de vie respectueux de l’environnement.
Ce premier bulletin municipal témoigne de plus de 50 années de communications par ce support papier.
Il a été rapidement suivi par le premier bulletin du Canton de Rocheservière.
Cette identité graphique a été associée à la première structure cantonale, le district, et a été conservée pour la seconde, la communauté de communes.
La fin des années 2010 a vu disparaître le Canton de Rocheservière au profit de la communauté élargie « Terres de Montaigu ».
A la fin des années 1950, deux services furent imposés aux habitants du bourg : le raccordement à la distribution d’eau potable gérée par le Syndicat de Legé et le raccordement au réseau municipal de collecte des eaux usées. Pour le traitement de celles-ci, une station d’épuration fut construite derrière la mairie avec des conduites empruntant les rives de la rivière.
Le bureau de poste des années 1960 était tenu par un receveur qui assurait la permanence de l’accueil du public du lundi au samedi. De plus, il avait autorité sur les deux facteurs qui assuraient la distribution du courrier et des télégrammes en vélo dans les foyers philbertins. Ces hommes avaient un bon coup de pédale pour porter les lettres et les mandats. Ils étaient reçus avec bienveillance quand ils sortaient leur portefeuille pour payer un mandat en bons billets de banque.
L’administration gestionnaire était les PTT (Poste, Télégraphe, Téléphone). C’est pourquoi les équipements de la téléphonie étaient hébergés dans ces locaux. Le téléphone était manuel. L’abonné actionnait la dynamo de son appareil, ce qui déclenchait un signal lumineux sur les meubles du centre de La Roche-sur-Yon. Une opératrice – appelée demoiselle du téléphone – enfonçait la fiche de son casque dans le jack sous la lampe allumée pour entrer en communication avec l’appelant et lui réclamer le numéro demandé. En fonction de celui-ci, elle le sonnait directement s’il se situait dans la même zone ou branchait le cordon sur un circuit desservant le centre distant. C’est ainsi que les deux abonnés étaient mis en relation.
Il fallut attendre les années 1970 pour que le téléphone automatique soit installé. A la fin du 20ème siècle, les équipements téléphoniques quittèrent le bureau de poste pour s’installer dans un local neuf proche de la rivière qui fut associé à un mât, support d’antennes de faisceaux hertziens et du réseau de téléphonie mobile.
À présent, la Rue de la Mairie est connectée à la Place du Champ de Foire par une passerelle au-dessus de l’Isoire. La boucle du circuit du patrimoine se ferme grâce à ce dernier tronçon.
Vous pouvez exprimer vos remarques, vos interrogations, vos difficultés, votre satisfaction, soit auprès de l’association Bouaine Patrimoine, soit auprès de la mairie de Saint-Philbert de Bouaine.
© Bouaine Patrimoine
Rédaction : Jean-Pierre Morisseau
Contributions : Danièle et Luc Airiau, Association de défense des Landes de Bouaine, Louis Gaboriau